Et Brigitte Bardot créa la flamme. Celle qui attira puis brûla les hommes qui l'ont aimée. Celle qui réveilla et libéra les femmes qui l'ont adulée puis jalousée. Celle qui inspira les cinéastes qui l'ont filmée et qui ont contribué à créer le mythe BB. C'est à la naissance de cette légende que France2nous propose d'assister avec cette coproduction internationale, consacrée à la jeunesse de l'actrice, depuis son adolescence au sein d'une famille bourgeoise dans la France de l'après-guerre, jusqu'à ses 26ans et sa tentative de suicide dans sa maison de la Madrague, à Saint-Tropez.
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Coécrite et coréalisée par Christopher et Danièle Thompson, dont c'est la première incursion sur le petit écran, cette minisérie explore en six épisodes le parcours d'une femme – restée insaisissable – derrière la star internationale, d'une amoureuse décomplexée, érigée en figure emblématique de la libération sexuelle dans une société encore corsetée. Et tente de comprendre comment Brigitte Bardot est devenue BB…
Le portrait d'une époque
L'entreprise est aussi complexe que risquée. S'attaquer à une telle icône n'est jamais chose aisée, surtout de son vivant. Aujourd'hui âgée de 88ans, Brigitte Bardot, qui a délaissé en1973– et en pleine gloire – les ors du cinéma pour se consacrer à la cause animale, n'a pas mâché ses mots sur le sujet: «Je ne suis même pas au courant de ce truc! Mais je m'en moque: la seule chose qui importe, c'est ma vraie vie avec moi dedans. Et pas des biopics à la con», a-t-elle déclaré au Journal du dimanche en décembre dernier, à l'occasion d'unentretien sur le classement des50personnalités des Français, où elle venait de faire son entrée.Dont acte pour Danièle Thompson qui affirme avoir contacté la star avant le tournage: «On s'est écritpour la série. Je l'ai informée, et elle m'a répondu très gentiment qu'elle voulait qu'on la laisse tranquille et qu'elle me faisait confiance.»
Faute de collaboration de la principale intéressée, la cinéaste et son fils se sont plongés dans la monumentale documentation disponible pour brosser son portrait, la star ayant fait couler – doux euphémisme – beaucoup d'encre: «Il y avait quelque chose de fascinant à raconter la trajectoire de cette créature hors norme et les passions qu'elle a déchaînées, notamment dans la presse, explique Danièle Thompson. Pour moi, BB représente une révolution, qui a été inconsciente. Elle a été une féministe, sans le vouloir, mais quelqu'un d'incorrect en le voulant.» Et d'ajouter: «On voulait également parler des carcans de cette époque, où l'on n'échappait pas aux jugements sur la maternité et l'avortement par exemple, même avec un destin aussi exceptionnel que le sien.»
Bluffante Julia deNunez
Voilà pour l'ambition. Quid de la façon? Pas de Bardot en effet, sans une parfaite incarnation…: «On a lancé le casting très tôt, car on se disait qu'il fallait absolument trouver la bonne personne», se souvient Pascal Breton, le coproducteur de la série, et grand admirateur de BB «qui [lui] a donné la passion du cinéma». «Et miracle! On a trouvé Julia deNunez. Sans être actrice, elle était Bardot, naturellement…»
Cette jeune femme de 22ans, qui fait là ses premiers pas devant la caméra, crèvelittéralement l'écran dans la peau de la star internationale en devenir. La ressemblance est saisissante jusqu'à être troublante, depuis la blondeur échevelée, jusqu'aux yeux de biche en passant par la moue boudeuse: «Brigitte Bardot a toujours fait partie de ma vie, elle m'est très familière. D'abord parce que j'ai vu beaucoup de ses films, et parce qu'on m'a toujours dit que je lui ressemblais, y compris à l'étranger, confirme Julia deNunez. C'est plutôt flatteur, même si cela prend aussi beaucoup de place…»
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Pas sûr que cela s'améliore après la diffusion de la série, d'autant que la comédienne a aussi réussi à capter la diction si particulière de son illustre modèle: «Dès le départ, on m'a demandé de ne pas tomber dans l'imitation, mais d'incarner. Je n'ai pas cherché à amener ce phrasé, cette musique. Mais je me suis surprise à l'adopter…» Tout comme la sensuelle gestuelle du sex-symbol. Elle en donne toute la mesure lors d'une séquence vibrante dans un club de la capitale, qui fait écho au mambo iconique de Et Dieu créa la femme: «J'ai pris des cours pour pouvoir jouer cette scène. La danse, c'est pour elle un espace de défouloir, de liberté extrême…»
Incroyable Bardot, Julia deNunez est entourée d'une brochette d'acteurs talentueux, parmi lesquels Hippolyte Girardot et Géraldine Pailhas, qui jouent les parents de Brigitte, Yvan Attal, qui campe Raoul Levy, le producteur, notamment, de Et Dieu créa la femme..., Louis-Do de Lencquesaing, inquiétant Henri-Georges Clouzot, mais aussi, et surtout, Victor Belmondo, qui se révèle dans le rôle de Roger Vadim, le premier mari et éternel ami de la star.
Le mystère Bardot reste entier
Mais une distribution, aussi brillante soit-elle, ne suffit pas pour passionner, sinon convaincre. Formellement soignée mais très (trop?) classique, la série a la beauté glacée des pages de magazine sur lesquelles l'image de l'actrice a été exploitée jusqu'à l'excès, ses amours impitoyablement disséquées. Elle manque de chairet,malgré la rage d'exister de son héroïne, de vie. À cet égard, les séquences où BB tourne parmi ses plus grands succèssont filmées comme celles où Brigitte boit, fume, aime, vit. Dans les deux cas, les gestes sont appuyés, les dialogues emphatiques. Et le quotidien de la star de ressembler à un film de la Nouvelle Vague…
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Laissé à distance, on peine à ressentir de l'empathie pour cette femme pourtant délaissée (notamment par sa mère), harcelée par les paparazzis, vilipendée par les conservateurs de son pays, mais qui paraît là égoïste, uniquement centrée sur son besoin d'aimer et d'être aimée, quitte à blesser. Loin de figurer l'émancipation féminine, elle semble totalement soumise à ses désirs, et esclave de ses pulsions, qui la maintiennent enchaînée. La faute notamment à un scénario qui multiplie les ellipses et brouille la compréhension de cet être complexe, dont on peine à saisir les motivations.
Qui est vraiment Bardot? Au terme des six épisodes, le mystère reste entier. Peut-être sera-t-il éclairci dans une suite potentielle, si les audiences, en France mais aussi à l'étranger, sont à la hauteur des grandes espérances. La série sera en effet diffusée sur Netflix après son passage sur France Télévisions…